♣ Pour le Soleil ou pour la Pluie • [ PV Kiyo ]

Apprentie Kendōka - 3e Année

♣ Espaces Indiqués & Subtiles Classes de l'Être ♣

~ C'est amusant, sans doutes, de voir à quel point le temps peut passer vite, lorsque l'on s'occupe, lorsque l'on s'active, lorsque l'on trouve de quoi braver l'ennui dans son esprit comme dans la réalité des choses et des lieux. La jeune Lymelud, n'avait pas vu le temps passer, depuis qu'elle avait été admise à la Pension Hisamatsu, tant cela semblait défiler à une vitesse incroyablement rapide et tout aussi incroyablement lente à la fois. Curieux paradoxe, n'est-ce pas ? Pourtant elle savait une chose : L'établissement, aussi sévère et particulier soit-il, lui avait toujours fait du bien. D'une nature peu ouverte, elle s'était finalement retranchée dans la sociabilité des plus pures, toujours aussi absente de son monde mais non moins attentive à tout ce qui pouvait se passer autour d'elle, de positif comme de négatif. Et, à vrai dire, à chaque vacances revenait le même refrain : Retourner chez sa mère, pour laquelle elle n'éprouvait pas grand chose. Le divorce de ses parents ? Cela ne l'avait pas touchée. La vie avec la figure maternelle de la famille ? Pas davantage. Rien, ne semblait l'atteindre, tandis qu'elle demeurait pourtant aussi insensible que particulièrement apprêtée à ressentir la moindre brise. Étrange personnage, complètement paradoxal en son essence. Toujours était-il que la demoiselle, non contente de retrouver sa chambre à la magnifique Pension après les vacances bien trop longues à son goût, s'y était en ce jour réinstallée avec la plus grande euphorie au monde, dans la solitude propre des lieux.

Tout, était à sa place, comme inchangé. Tout avait demeuré, là, en une propreté extraordinaire, tandis que la jeune fille avait décidé d'y laisser quelques affaires personnelles, sans grande valeur sentimentale – Il fallait bien dire que tous les objets de valeur étaient systématiquement confisqués par la sous-directrice, alors bon. Chantonnant en un Anglais désormais japonisé par son habitude de la langue nippone, la Kendôka se vouait à présent au déballage de ses effets, accrochant de nouveau son uniforme – En de multiples exemplaires - dans le placard, situé à même le mur.

Pom pom pom pom pom ♫

Belle journée, n'est-ce pas ? Oh, oui, c'en était certain. Un sourire calme affiché sur ses lèvres rosées, la jeune Lymelud se perdait alors à quelques réflexions sur tout et rien, mais surtout, oui, sur un fait bien particulier : Revenir à la Pension, cela voulait dire, revoir ses amis. Tobeï, Maho, Nina, que de bonnes nouvelles. Mais encore mieux, le mieux du mieux de l'ultra mieux, c'est que ça voulait également dire, qu'elle aurait de nouveaux cours avec son professeur de Cérémonie du Thé, Isabelle Ta Kae. Ah, les Dieux seuls savaient, à quel point cela pouvait faire plaisir à la demoiselle, qui chantonnait déjà à cette idée ! Pour son premier cours, elle ne laisserait rien au hasard, ah ça non. Tout serait parfait, ne serait-ce que pour ne pas attirer les mauvaises attentions de son terrible professeur. Parce qu'elle s'en était déjà pris, des baffes, la pauvre Lymelud, pourtant adorable enfant dans ce monde de brutes ! Mais que voulez vous, elle avait déjà fauté plusieurs fois en présence de son ainée, et cette dernière n'avait jamais hésité à le lui faire comprendre. Bon, au moins, elle n'avait jamais été frappée par ses éternelles piques de métal... C'était déjà ça.

Enfin ! ♪

Se redressant tandis qu'elle avait tout rangé dans sa chambre typiquement organisée à la Japonaise, la Kendôka ne put réprimer un sourire, joignant ses mains entre elles en une expression plutôt positive, malgré ses airs absents qui forgeaient un naturel étrange sur son visage de poupée, comme perdue dans un autre monde bien lointain.

« Par-fait ♪ »

Mais il y avait toujours un problème, oui. Le problème, maintenant, était que le jour des installations, avec les autres filles qui marchaient rapidement dans les couloirs pour ne rien oublier, il n'y avait pas de cours. Pas de cours, ça voulait dire, ~~pas de TaKae~~ de l'ennui. Un ennui, que la demoiselle détestait par-dessus tout. Bon, alors, que faire. Sans doutes est-ce que ses camarades étaient occupées, à ce moment de la journée. Alors, hmhhh... Pourrait-elle aller s'entrainer au sabre ? A vrai dire, elle n'en avait pas grande envie. Alors...

Mais oui !
Ça y était.
Elle allait, écrire une lettre à sa mère.
Tout simplement !

Ignorant sans doutes que ses supérieures hiérarchiques refuseraient bien d'avancer les sous pour le prix du timbre qui pourrait permettre – Ô miracle – à sa lettre d'atteindre cette mère qu'elle avait quitté dans la journée, Lymelud s'était finalement décidée à lui écrire quelques mots pour annoncer qu'elle était bien installée, puisque les outils technologiques comme le téléphone portable étaient ici interdits, et que la restreinte salle des appels devait être bondée à cette heure. Enfin. Farfouillant dans ses affaires, les sourcils froncés en une expression pourtant adorable, la pauvre enfant trouva rapidement son pinceau de calligraphie, mais, malheureusement... Il n'en fut rien de son encre.

Bon sang !
Ce n'était pas possible...
Comment avait-elle pu être aussi bête, pour l'oublier chez elle ?!
Mais quelle empotée...
Dans la lune, comme à l'ordinaire.

Bon. Ben, maintenant que tout était préparé, elle n'avait plus qu'à aller chercher de l'encre chez une de ses camarades. Haussant vaguement les épaules – Pour elle-même, puisque personne n'était là pour la voir – elle ouvrit donc la porte coulissante de son univers pour se retrouver dans le couloir. Mais quelque chose, heurta alors son attention. Deux filles de quatrième année s'étaient postées devant l'une des chambres pour regarder quelque chose... Mais quoi, exactement ? S'approchant d'un même temps que les demoiselles poursuivaient leur route après un soudain arrêt, Lymelud jeta un œil à ce qu'elles avaient pu observer quelques secondes avant elle. Une petite plaquette de bois, gravée par l'administration, comme à l'ordinaire, qui laissait apparaître un nouveau nom, l'élève présente dans cette chambre l'année précédente ayant laissé la place à une nouvelle.

« Monukai Kiyoshi... »

Songeuse, l'air absent que l'on lui connaissait bien rivé sur son visage fin et pâle, la demoiselle afficha un sourire, après avoir soufflé le nom de l'occupante, tout juste devant sa porte. Une nouvelle. Lymelud, aimait bien voir le visage des nouvelles arrivées à la Pension. Alors, c'est sans l'ombre d'une hésitation qu'elle frappa sur le bois de l'encadrement de la porte, une voix lunaire vrillant alors au fond de sa gorge, en quelques élans naïfs et spontanés :

« Monukai... Kiyoshi-San ?
Est-ce que tu aurais de l'encre, s'il te plait ? ♥ »

Allez, les deux pieds dans le plat. Du Lymelud, tout ça, que voulez-vous. Et pourtant, elle affichait toujours ce sourire des bienheureux, sans l'ombre d'un doute, sans l'espace d'une ombre, simplement là, simplement elle.

Ah, Lymelud, Lymelud.
Charmante entité de perle,
Aussi libre que de la vapeur d'eau.
Trois coups portés,
Une petite voix,
Elle était là,
Pour le meilleur et pour le pire.
Yoooosh !
♠

Invité

I never said I'd lie and wait forever
If I died we'd be together
I can't always just forget her
But she could try

Citation :: De tels remerciements, si sincères, ne valaient rien sans le regard qui les accompagnait. Ca pouvait être un regard fuyant parfois, n'assumant pas forcément d'avoir reçu une telle aide. Mais en cet instant, ne pas la reconnaître serait le pire des affronts qu'elle pouvait faire à la Grande Dame. Alors elle affrontait son regard, et l'échange qui en résultait ne pouvait alors qu'être beau. Il renforçait le lien qui existait déjà entre les deux femmes, car désormais Elle pouvait presque être considérée comme une femme, et leur permettait de le renouer, plus solidement que jamais. Au point qu'en cet instant il n'y avait besoin d'aucune étreinte pour témoigner de leur affection respective, alors que ses mots venaient trouver les oreilles de la brune.

« Tu as toutes les clefs en toi, Aylen,
Jamais n'aurais-je pu te laisser marcher à leurs côtés sans même les voir~ »

Elle lui glissa un sourire reconnaissant, bien qu'encore un peu timide, en guise de seule réponse. Oui, elle savait qu'elle avait tout en elle pour l'instant, et que si elle avait continué de s'enfoncer, elle se serait perdue et n'aurait jamais pu remonter et les utiliser. Elle n'aurait jamais pu vivre réellement. Elles continuèrent de s'observer, jusqu'à ce que les cliquetis des talons résonnant dans les grands couloirs du manoir ne retentissent jusqu'à elles, précipitant les choses. Sa mère pourrait arriver d'un instant à l'autre, et elle savait qu'il ne le fallait pas. De toute façon, elle ne voulait pas la voir pour le moment. Elle lui en voulait trop de ne pas avoir su faire ce que la Grande Dame avait fait. De lui avoir ne serait-ce qu'accordé de l'attention. Tout du moins c'était ainsi qu'elle le pensait, ne voyant pas les regards à la dérobée de sa mère, inquiète plus qu'elle n'aurait su le dire. Finalement, tout s'accéléra donc, Amaryllis la prenant dans ses bras, dans une courte, très courte étreinte, que la jeune femme lui rendis, fermant les yeux un instant. Et quand elle la rompit, aussi rapidement qu'elle l'avait prise, elle lui glissa entre les mains la boule composée d'étain, de mercure et de verre, formant un tout aux subtilités complexes.

« Je t'aime, Aylen. »

Elle ne lui laissa pas le temps de répondre, elle tournait déjà les talons pour disparaître. Le claquement des talons contre le sol s'évasa rapidement, pour ne laisser à nouveau que le silence. Le regard porté sur la porte de la jeune femme finit par dévier jusqu'à l'objet qu'elle tenait toujours en main. Finalement, elle se retourna pour aller le poser sur son lit. Il faudrait qu'elle lui trouve une place, quelque part, ailleurs que dans son cœur et ses souvenirs. Puis elle se dirigea vers la fenêtre pour l'ouvrir, et faire de même avec la seconde, laissant entrer l'air chaleureux du printemps.

Comme tous les ans, il renaissait, et comme tous les ans, Aylen se ferait sans doute un plaisir de l'observer. Même s'il ne serait plus jamais comme avant.

Kiyo tourna la dernière page du livre et resta un instant sans rien dire. Simplement à regarder le blanc de a page. Eh bien... Le retournement final, si on pouvait dire ça comme ça, était plutôt bien réussit. Elle devrait néanmoins patienter pour avoir la suite de ce fabuleux récit. Misère. Elle referma la couverture du livre, et regarda par la fenêtre de la voiture qui la conduisait à la pension. Elle poussa un soupir. Etait-ce vraiment inévitable ? Oui, sans doute. Enfin, ça ne serait pas plus mal, de s'éloigner ainsi de sa famille. Même si elle n'aimait pas trop l'idée de se retrouver enfermée toute l'année dans un pensionnat. Il avait au moins l'avantage d'être un pensionnat traditionnel japonais. Et donc les étrangers ne devaient pas être acceptés dans l'établissement... Quoique ~

Enfin, elle n'eut pas le temps d'y réfléchir plus avant, car elle arriva sur les lieux, et après une rapide visite, trouvant les lieux magnifiques au passage, elle pu aller s'installer dans les dortoirs, où elle avait une chambre à son nom. Et très sincèrement, c'était sans doute là que les ennuis allaient commencer. Le chauffeur partant, elle se retrouva seule devant la porte, qu'elle ouvrit en la faisant coulisser dans un doux bruit reconnaissable entre mille. Et lorsqu'elle arriva dans la pièce elle se stoppa net. Elle savait que le lieu avait pour objectif de respecter les traditions et le reste, mais là... C'était juste... Peut-être un peu trop. Pas de lit. Juste un bureau bas avec un coussin dessous. Et un placard encastré. Bon, et une fenêtre, évidemment. Traditionnelle, elle aussi. Attendez. Fenêtre traditionnelle... Mais... Ils allaient mourir de froid en hiver. Enfin, elle allait mourir de froid en hiver. C'était pas possible. Elle ouvrit alors le placard, après avoir traîné ses valises au milieu de la pièce. Bon, ça allait encore de ce côté là, il y avait de la place. Et un futon. Ah non. Non, non, non, pas un futon. Elle n'allait pas dormir dans ça. C'était juste... Son dos allait mourir. Pas que ça soit si inconfortable évidemment, mais elle préférait les lits, pour se lever le matin c'était tellement plus facile. Là elle allait galérer pendant des heures rien que pour réussir à se mettre sur ses pieds. Bon, d'accord, elle exagérait, mais c'était pas loin de la vérité quand même. Allez Kiyoshi, reste calme, ce n'était pas la fin du monde quand même. Un peu parce que tu n'avais pas le droit à l'ordinateur, au portable et au reste, mais tu allais survivre, allez !

Elle commence donc à déballer ses affaires, et c'est là que le drame commence. Parce qu'évidemment, notre jeune adolescente n'a pas la moindre idée de comment ranger tout ça. Ou du moins, elle ne s'en préoccupe pas vraiment, ne trouvant pas que ça soit si horrible d'avoir quelques petits choses qui traînent. C'est ainsi qu'elle finit par laisser sa valise traîner vers le placard, avec des affaires un peu éparpillées autour, et un livre de Tsumego et de Kifu entre les mains qu'elle feuillette avidement, résolvant les problèmes de vie et de mort les uns après les autres, assise en tailleur sur le sol. Facilement déconcentrée ? Non. Mais par le go, oui. Même si ça n'était pas une très bonne chose, parce qu'au rythme où ça allait, elle aurait résolu la moitié du livre avant la fin de la journée. D'ailleurs, elle se demandait s'ils avaient un club de go dans le coin... Relevant les yeux du livre, elle décida d'aller faire un tour rapidement, laissant en plan ses affaires après avoir jeté son livre sur le bureau. Voilà que ça commençait bien...

Elle revint tout de même rapidement jusqu'à sa chambre, se rappelant qu'elle devait finir de ranger ses affaires. Et se disant que très sincèrement, elle donnerait tout l'or du monde pour ne pas avoir à s'en occuper. C'est vrai quoi, elle n'avait jamais eu à le faire. Chez elle, elle prenait ses affaires dans son placard, sans se poser de questions, et laissait traîner dans un coin ce qu'elle décidait de ne pas porter pour laisser la femme de ménage les ranger. Ce n'était pas comme si elle était payée pour faire de la figuration non plus. A la réflexion, elle pourrait peut-être l'appeler pour lui demander de venir ranger ? Non ? Bon d'accord, ça serait peut-être abusé. Mais ça serait toujours mieux que de rester assise en fixant ses affaires et en espérant que ça se range tout seul. Le pire étant peut-être qu'elle commençait à sortir un truc de son bagage pour le ranger, sauf qu'une fois sur deux, douée qu'elle était, elle le dépliait à moitié, et s'énervait à essayer de le replier ensuite. Sans succès. La mettant en colère. Et là la vêtement volait à travers de la pièce joyeusement. Yeah, je vole ! \o/

Puis finalement, alors qu'elle essayait tant bien que mal d'accrocher une chemise à un cintre, elle entendit quelqu'un frapper à la porte, et une voix étouffée derrière. Oh Gosh, faites que ça ne soit pas un professeur ou un surveillant, sinon elle allait mourir crucifiée ! Bon, elle se relève quand même et balance le cintre avec une chemise à moitié accrochée dessus pour aller ouvrir et découvre une jeune fille qui est... pas japonaise. Horreur. La voilà qui recule d'un pas, et a des sueurs froides. Il n'y avait pas que des japonais ici ? Bon, allez reste calme, respire, tout va bien se passer.

- Euh... Oui, je peux t'aider ? Tu as parlé juste avant, mais je ne t'ai pas entendu. A cause de la... porte.

You don't say ?
Elle ne sait pas pourquoi elle précise ça en fait. Ca coulait tellement de source... Enfin, peut-être pas pour la demoiselle en fait puisqu'elle avait parlé devant la porte sans attendre qu'on vienne lui ouvrir. En tout cas, Kiyo ne se sentait pas tout à fait très à l'aise pour le coup, bien qu'elle essayait de se contrôler pour ne pas reculer jusque la fenêtre et sauter de là pour s'enfuir. Finalement la formation ninja aurait pu être cool.

At the end of the world
Or the last thing I see
You are never coming home
Never coming home

Apprentie Kendōka - 3e Année

♣ Oh dreams ! ♣

~ Toujours droite devant la porte coulissante de cette fameuse chambre, la jeune Lymelud ne manqua pas de patience, après avoir laissé entendre sa voix. A vrai dire, pas même n'était-elle en mesure de se rendre clairement compte du temps qui défilait, qu'il soit long ou bien réellement court. Là, debout dans son uniforme bien classique orné du sublime blason du pensionnat, elle se balançait rêveusement d'avant en arrière, l'air d'une chanson résonnant au fond de son esprit. Mr Sandman. Mais que diantre cette musique faisait dans sa petite tête d'enfant, alors que l'établissement ne lui avait pas permis d'écouter de quelconques notes que ce soit, depuis son arrivée ? Hé bien... La réponse ne pouvait être plus simple : Une vieille cassette, qui avait tourné dans la carcasse qui servait de voiture à sa mère, en quelques mélodies qui l'avaient finalement suivies jusqu'à la Pension. Bon. Le principal était, de ne pas se laisser entrainer par la chanson, pour ne pas être tentés de la marmonner à voix haute, n'est-ce pas ? Alors elle était là. Simplement. Elle avait parlé, devant cette porte, un sourire aux lèvres et un air parfaitement absent ancré sur son visage fin, tandis qu'elle ne savait même pas si l'occupante s'y trouvait ou non. Après tout, qui ne tentait rien ne pouvait rien avoir, n'est-ce pas ?

Mr Sandman~
Bumbumbumbumbum... ♫

Ne pas ouvrir la bouche. Ne pas chanter. Ne surtout pas chanter. Et... Euh, oh ? Voilà que la grande porte coulissante s'était ouverte, dévoilant alors la silhouette de cette camarade qu'elle n'avait jamais croisé de sa vie, alors bel et bien nouvelle à Hisamatsu. Le sourire rêveur de Lymelud s'agrandissant quelque peu, elle haussa doucement les sourcils, un côté lunaire perlant toujours sur son regard qui semblait interroger sans réellement se soucier du monde. A peine put-elle déceler le soudain recul de la demoiselle qui lui faisait face, par ailleurs. Avait-elle cru voir un fantôme ? Oh, si peu, si peu. Seulement une étrangère, mais cela, Lymelud n'en avait absolument pas conscience. Plongeant ses grands yeux dans ceux de son interlocutrice qui avait reculé d'un pas, la Kendôka sentit son sourire traverser son visage alors qu'elle la couvrait de son éternel air rêveur et tout aussi interrogatif, ne tardant pas à répondre à ses quelques paroles, sans même laisser le silence s'installer à la fin de la phrase de la curieuse nouvelle arrivante :

« Bonjour, Monukai Kiyoshi-San ♪
Je suis Lymelud. Lymelud Dether. »

Hein... Que, quoi ? Oui, vous l'aurez bien compris, la demoiselle s'était de nouveau faite entendre sur les présentations, alors qu'elle semblait ne pas clairement avoir prêté attention à la remarque de sa camarade, bien fidèle à elle-même. En vérité, Lymelud était une jeune fille on ne peut plus attentive aux autres, mais surtout lorsque les répliques qui lui venaient en face avaient pour elle la qualité de recevoir une réponse correcte... Ce qui n'était vraisemblablement pas le cas en cet instant, puisqu'elle avait royalement ignoré les propos de la Kyûdoka. Enfin. Inclinant légèrement la tête sur le côté alors qu'elle observait toujours sa camarade – En une aura un peu oppressante, il fallait bien l'avouer, tant elle semblait présente et ailleurs à la fois – elle ne tarda par ailleurs pas à ajouter, d'une voix presque chantante :

« En fait, je venais pour... Oh, mon dieu. »

Sa phrase, n'avait pas quitté les tonalités évasives qui lui allaient si bien, tandis que sa dernière expression témoignait pourtant d'une certaine surprise. Élan paradoxal. En vérité, les yeux de la jeune fille n'avaient pas tardé à dériver du visage de la jolie Japonaise, pour dévier un instant vers sa chambre... Qui lui offrit un bien pitoyable spectacle. Mon dieu, oui. Qu'est-ce que c'était que ça ? Toutes ces affaires... Par terre ? Dérangées ? Éparpillées ? Donnant un caractère presque européen à cette pièce organisée le plus traditionnellement du monde ? Instant de réflexion. Pause mentale. Et puis, les prunelles de Lymelud caressèrent à nouveau la personne de Kiyoshi, alors qu'elle affichait à présent un sourire plus calme, terriblement profond, tant et si bien qu'il en aurait presque pu paraître effrayant aux yeux d'une personne peu habituée. Ce fut alors d'un ton le plus calme et le plus léger du monde, que la menace des enfers prit toute sa forme, comme si l'évidence même pouvait sortir de la gorge de la Kendôka :

« Est-ce que tu comptes laisser ta chambre dans un état pareil ?
Je serais toi, j'éviterais. ♪ TaKae-Sensei n'aime pas vraiment tomber sur ce genre d'univers lors de ses inspections, si tu vois ce que je veux dire. ♥ »

Son air calme, très calme, trop calme, donnait une impression étrange à la scène, tandis qu'elle fixait toujours la demoiselle en face d'elle avec ce sourire accroché aux lèvres. Une simple expression bien commune, oui, mais qui finissait presque par en devenir oppressante, à la longue, et d'autant plus sur un visage aussi fin, qui déviait en de terribles similitudes avec les esprits que l'on pouvait voir apparaître dans quelques films d'horreur nippons. Mais au fond, rien de mauvais en sa personne, bien loin de là. Il ne s'agissait, que d'une constatation. Bien trop légère pour paraître vraiment menaçante, mais qui cachait finalement de bien terribles vérités. Pour sûr, que le professeur de Cérémonie du Thé ne serait pas contente. Pas contente, du tout, du tout.

Sourire.
Encore un sourire, qui ne faiblissait pas.
Bonjour, Kiyoshi,
Et bienvenue,
A la Pension,
Ta nouvelle demeure.
♥

Invité

Exile
It takes your mind again
Exile
It takes your mind again

Kiyo avait une toute autre musique en tête. Une musique moins fabuleuse, non pas dans le sens d'extraordinaire, mais dans le sens de la fable. Du vrai fabuleux, de ce qui n'existe pas. Kiyo était, quelque part, trop terre à terre pour réellement croire au Marchand de Sable. Alors cette chanson ne lui plaisait pas. Ce qui était paradoxale en même temps, quand on sait que pour jouer au go, il faut être capable de voir au delà de ce qu'il existe déjà sur le goban, de créer des formes, des univers entiers, révéler les territoires, les frontières, les faire se mouvoir. C'était un jeu tellement créatif dans son essence, qui évoluait encore après des milliers d'années d'existence, qu'il était même étonnant qu'elle l'aime autant. Ou peut-être était-ce simplement dû au fait qu'elle avait fini par ne croire qu'en ce monde là. Mais le sujet n'était pas vraiment là pour le moment. Il en était plutôt à l'instant présent et la rencontre entre ces deux singulières jeunes femmes.

Et si Kiyo ne se pensait pas si singulière que ça, malgré ses divers talents, sa vis-à-vis l'était, à ses yeux, singulière. Déjà parce qu'elle était visiblement une étrangère.
Une étrangère.
Et que ça suffisait à bloquer notre jeune kyûdoka qui ne s'attendait pas franchement à voir une fille venu d'ailleurs dans une pension traditionnelle. Elle savait les Européens bien trop... enfin... Européens quoi, et ne parlons pas de l'Amérique. Ils n'avaient pas la discipline nécessaire pour se trouver ici, selon elle. Elle la dévisagea donc un instant. Les cheveux de couleur claire, et les yeux aussi. C'était assez étonnant à voir, elle n'y était pas franchement habituée. Elle avait beaucoup plus été élevée dans un univers tout de noir et de nacre, avec quelques nuances plus brunes. Même si à l'école elle avait pu voir des personnes plus variées. Et en jouant au go aussi. Mais elle avait toujours eu tendance à les éviter. Alors se retrouver là tout de suite, confrontée à cette fille, ça lui faisait un choc. Pourtant elle passa outre, pour prendre la parole, bien qu'on entendait dans sa voix un peu de sa surprise. Kiyo n'était pas douée pour cacher ce qu'elle pensait vraiment, elle était trop impulsive, ce qui n'était pas franchement une qualité pour elle. Elle aurait aimé pouvoir être de nature bien plus réfléchit. Mais malgré l'attention que lui porta la jeune japonaise, son interlocutrice ne sembla pas tout à fait relever. Et son air absent rendait la chose bien étrange. Car elle poursuivit sur autre chose.

Elle se présenta. Et elle avait là un nom bien étrange, sans parler de la difficulté à le prononcer. Enfin, ça ne posait pas de problèmes à Kiyo, soyons honnêtes, elle avait toujours eu un certain don pour les langues. Du coup, la jeune femme eu un léger froncement de sourcils. Eh bien ! Il serait bien de répondre à sa question tout de même. Même s'il était vrai que les présentations étaient pour le moins bienvenues. Sur le coup elles avaient particulièrement surprises la nouvelle élève dirons-nous. Enfin.

- Enchantée, Dether-san.

La prononciation restait plus que correcte, pour un premier essaie en tout cas. Mais elle n'en restait pas moins perplexe face à cette élève dont elle s'était un peu reculée plus tôt, sans faire attention. Et là encore, sans trop s'en rendre compte, elle mettait le plus de distance possible entre sa cadette et elle, en l'appelant par son nom de famille alors que l'utilisation du prénom aurait pu passer encore. Finalement, la fille qui semblait un peu dans la lune entreprit de répondre à la question de Kiyoshi, qui resta attentive malgré tout. Sauf que la réponse ne fut pas entière, puisque notre chère étrangère prit un air choqué, en jetant un coup d'oeil à l'intérieur de la chambre où régnait un désordre pour le moins impressionnant.

Kiyo se sentit alors quelque peu mal à l'aise devant la surprise de sa vis-à-vis, et elle aurait mis sa main à couper que ses joues avaient légèrement rougis. Elle passa sa main derrière sa nuque en baissant un peu la tête, en signe de gêne. Et ça ne s'arrangea pas quand Lymelude vint enfoncer le couteau et le retourner dans la plaie. Du citron et du sel pour aider peut-être ? Surtout que le ton qu'elle employa.... calme... Elle avait tellement l'impression qu'elle se moquait d'elle ainsi, qu'elle n'aimait pas vraiment ça. Elle avait envie de lui claquer la porte au nez, si tant est que l'expression se dise avec des portes coulissantes. Mais à vrai dire, elle ne se sentait pas trop d'humeur à retourner ranger son bazar toute seule pour le coup. Surtout qu'elle n'y arriverait sans doute pas.

- Non, je n'ai pas vraiment dans l'idée de laisser ma chambre comme ça.

Son ton était un peu froid et rigide, pas vraiment amical, sans qu'elle le fasse réellement exprès.

- Mais... Je ne sais pas non plus très bien comment... ranger. Surtout que je me laisse facilement distraire.

Elle observe à nouveau la jeune femme qui semble toujours aussi calme, aussi souriante. Le genre de fille dont Kiyo aurait plutôt tendance à se méfier. L'innocence cachait toujours quelque chose à ses yeux, et ne pouvait pas réellement exister. Si elle était comme ça, c'est que quelque chose clochait forcément. Finalement, fierté mise de côté et considération xénophobes également, elle décida de quémander un peu d'aide à sa camarade. Tant qu'à faire.

- Hum. Je t'aide pour ce que tu es venue me demander, et tu m'aides à ranger ?

He, c'était un échange de bon procédé, vous ne pensez pas ? Alors que la musique tournait toujours dans sa tête.

Have you given up?
Does it feel like a trial?
Does it trouble your mind
The way you trouble mine?

Apprentie Kendōka - 3e Année

♣ So nice to meet ya ♣

~ Debout, là, absente et présente à la fois... Du Lymelud Dether dans toute sa splendeur, à vrai dire. Ses grands yeux détaillant le visage de sa camarade, elle ne semblait pas broncher, gardant ce fin sourire accroché au visage en un flou croissant de lune, comme s'il y avait été dessiné avec la plus vive des grâces. Un ton froid, dur, rigide ? Peu importait, le ton qu'avait utilisé la Kyûdôka à son égard à vrai dire, cela était bien passé au-dessus de la tête de la jeune fille, qui, alors, ne gardait en elle que la consistance de la phrase sans réellement avoir prêté attention au refus de conversation de celle qui lui faisait face, sans doutes trop peu réceptive à ces quelques élans négatifs pour en être blessée d'une quelconque façon. Elle n'avait pas « vraiment » dans l'idée de laisser sa chambre comme ça, d'après ce qu'elle disait. Ah, bon... ? Hé bien voilà qui était rassurant, finalement ; Lymelud n'avait pas réellement envie, de son côté, d'être dans le champ de vision de son professeur de Cérémonie du Thé si cette dernière en venait à porter ses foudres sur la nouvelle lors de l'inspection de sa chambre. Alors, les seuls mots qui avaient filés, d'un ton rêveur, prenaient cette lointaine forme, si légère :

« Oh, je vois~ ♪ »

Mais déjà, la Japonaise rajoutait quelque chose, visiblement encore sur la défensive mais avouant tout de même un fait relativement... Perturbant ? Oh, à peine. Alors ainsi, elle ne savait pas comment ranger sa chambre ? Pardon ? Était-ce seulement possible, ça ? Ah oui, si elle se laissait facilement distraire par ce qu'il se passait autour d'elle, sans doutes est-ce que le rangement devait être effectivement plus long. Mais est-ce qu'il y avait là une raison pour ne pas savoir ranger ses affaires au point de les éparpiller à même le sol dans l'ensemble de la pièce ? Un peu perplexe, Lymelud se contenta d'arquer légèrement ses sourcils en une mine délicate, comme intéressée par les propos de la jeune fille, sans pourtant y apporter de quelconque jugement que ce soit, positif comme négatif.

Hum. Je t'aide pour ce que tu es venue me demander,
Et tu m'aides à ranger ?

Attendez un instant. La Kyûdôka était-elle sérieuse, en disant cela ? A en voir son regard plutôt fermé et ses allures déterminées, sans doutes était-ce bel et bien le cas, en effet. Alors, elle lui demandait de l'aide, comme ça, cash, en échange de cette encre dont Lymelud avait besoin pour écrire sa lettre ? Clignant un instant des yeux d'un air vague et étonné sans réellement laisser la grande surprise passer sur son visage fin, la demoiselle garda son sourire ancré sur ses lèvres rosées, semblant alors se perdre en une réflexion de quelques secondes avant de hausser légèrement les épaules, répondant d'une voix claire, peut-être un peu plus naïve qu'elle ne l'était réellement en son for intérieur :

« Si tu veux, oui ! ♫ »

Malgré sa révulsion, Kiyoshi acceptait alors de la faire entrer dans son univers ? Tant mieux, sans doutes. Souriant à nouveau tandis qu'elle joignait ses mains contre la jupe de son uniforme avant de se balancer très légèrement d'avant en arrière – Son regard brillant d'une divine neutralité toujours rivé sur la demoiselle – Lymelud ajouta alors :

« J'avoue que tu n'es vraiment pas douée au rangement.
Par quoi tu veux qu'on commence ? »

Haussant les sourcils, elle avait interrogé Kiyoshi du regard, avant de la dépasser et d'entrer dans la chambre. Mais alors qu'elle constatait l'étendue des dégâts, Lymelud attrapa une des chemises blanches qui trainait à terre, se redressant avec le vêtement à la main avant de filer jusqu'au placard incrusté dans le mur afin d'en sortir un cintre. Se retournant vers sa camarade, un air malicieux fila sur son visage tandis qu'elle prenait la parole, visiblement amusée :

« C'est pas bien compliqué pourtant, t'es un peu bizarre~
Regarde, c'est simple, les cintres sont faits pour les uniformes... Là tu accroches ta chemise, puis aux pattes ta jupe, et tu recouvres le tout de ta veste~ TADAH ! ♥ »

Deux temps, trois mouvements, et l'ensemble trois-pièces de la demoiselle pendait gracieusement au bout du cintre que brandissait la jeune fille sous les yeux de sa camarade, ayant exécuté ses mouvements tout en parlant, en une dextérité et une rapidité extraordinaire lorsque l'on avait l'habitude de la voir complètement dans la lune, un peu à l'Ouest du monde entier. Apparemment, elle était satisfaite de sa performance. Plus encore, elle rayonnait de cet impressionnant naturel de légèreté, qui tranchait à la perfection avec le caractère renfrogné de Kiyoshi. Enfin ! Cela ne lui posait vraisemblablement aucun problème, puisque son intense sourire persistait, sous ce regard brillant d'une complicité soupçonnable d'être à sens unique.

Hé bien... Voilà ?
Regarde, comme c'est joli~
Vite fait, bien fait,
A toi maintenant.
♥